Retrouvez ci-dessous comment se déroule un procès pénal, depuis le dépôt de la plainte jusqu’au procès.
I. LA PLAINTE : première étape d’un procès pénal
A .Conditions pour porter plainte
Une infraction doit avoir été commise.
La victime doit être directement concernée par le préjudice.
La réalité et l’importance du préjudice devront être établies et le fait qu’il soit imputable à l’accusé prouvé.
Il faut que l’infraction ne soit pas prescrite, soit 3 ans pour un délit et 10 ans pour un crime, à compter du jour de l’infraction.
Il existe une particularité pour les victimes de moins de 18 ans:
Pour certains délits, tels que violences habituelles, administrations de substances nuisibles, agressions et atteintes sexuelles, proxénétisme et corruption de mineurs, le délai de 3 ans ou de 10 ans pour les crimes, ne commence à courir qu’à partir de la majorité de la victime.
Il est important en règle générale de porter plainte le plus tôt possible, afin de préserver le maximum d’éléments de preuves.
Il est primordial également d’avoir à l’esprit que seuls certains actes interrompent la prescription.
Ainsi dans le cas d’un dépôt de plainte simple, la prescription n’est interrompue qu’après transmission au procureur et que celui-ci ait donné des ordres la concernant.
En revanche, en cas de dépôt de plainte avec constitution de partie civile, la prescription est immédiatement interrompue.
B. les différentes plaintes
La victime doit être informée que le retrait ultérieur de la plainte ne permet pas de faire cesser l’action du ministère public quand elle est enclenchée, sauf lorsque la plainte est une condition nécessaire de la poursuite, ainsi que le précise l’article 6 du Code de procédure pénale.
Il s’agit des délits d’abandon de foyer, d’une part, et du délit d’atteinte à l’intimité de la vie privée prévu à l’article 226-6 du Code pénal, d’autre part.
Dans tous les autres cas, le retrait de la plainte n’a normalement pas d’influence sur la poursuite de l’action publique.
1. la plainte simple et par courrier
a) la plainte simple
Elle peut être faite dans n’importe quel commissariat de police ou de gendarmerie (Loi du 15 juin 2000).
Néanmoins, il est recommandé de se rendre au commissariat ou à la gendarmerie la plus proche des lieux de l’infraction.
La plainte sera ensuite transmise au Procureur de la République, et celui-ci pourra soit classer l’affaire, soit si l’affaire est simple, utiliser la citation directe et saisir directement le Tribunal, soit ouvrir une information et faire désigner un juge d’instruction.
b) la plainte par courrier au Procureur de la République
Elle doit être fait sur papier libre, à l’attention du Procureur de la République du Tribunal de grande instance du lieu de l’infraction ou du domicile de l’auteur de l’infraction.
La lettre doit contenir :
- L’état civil complet du plaignant
- Le récit détaillé des faits, la date et le lieu de l’infraction
- La description et l’estimation provisoire ou définitive du préjudice (préjudice corporel, préjudice moral, préjudice matériel)
- Les noms et adresses des éventuels témoins de cette infraction
- Les éléments de preuve à disposition
Il est fortement recommandé de joindre à la plainte des pièces justificatives en copies certifiées conformes, telles que certificats médicaux, témoignages…
L’avantages de ces deux premiers types de plainte sont qu’il n’y a pas de formes particulières, que la victime n’a pas besoin de qualifier l’infraction et de désigner le texte du Code pénal applicable, et qu’elle n’a pas à consigner de somme d’argent.
L’inconvénient de celles-ci est que la décision de poursuivre appartient au procureur, et qu’il peut décider de classer sans suite, notamment si la preuve de l’infraction n’est pas établie.
Dans ce cas, la victime a la faculté de déclencher elle-même les poursuites pénales, par deux autres moyens :
2. la citation directe et la plainte avec constitution de partie civile
Il est important d’informer la victime, surtout si son dossier n’est pas suffisamment étayé et qu’elle ne dispose d’aucun élément probant, qu’il est possible qu’elle soit condamnée à une amende ou à des dommages et intérêts.
Ainsi, le juge d’instruction ou le tribunal correctionnel, qui ont prononcé respectivement soit une ordonnance de non lieu, soit une relaxe, peuvent condamner la partie civile fautive à une amende civile.
Enfin la personne visée à tort a la possibilité de demander des dommages et intérêts, tant devant le juge d’instruction (dans un délai de 3 mois à compter de l’ordonnance de non lieu), que devant le Tribunal correctionnel (sur le fondement de l’art 472 du CPP), si la plainte est jugé abusive ou dilatoire.
Cette poursuite peut être engagée pendant le délai de prescription pénale.
a) la citation directe
Elle doit être faite auprès du doyen des juges d’instruction du TGI dans le ressort duquel l’infraction a été commise ou dans celui du domicile de l’auteur supposé de l’infraction si celui-ci a été identifié.
Elle doit contenir, une explication des faits, ainsi qu’une déclaration expresse de constitution de partie civile, ainsi qu’une déclaration d’adresse.
Par mesure de sécurité, il peut être important pour la victime de garder le secret sur son adresse, et il est recommandé de lui conseiller de se faire domicilier chez quelqu’un de son choix ou plus opportunément chez son avocat.
Elle permet d’obliger le Procureur de la république à engager des poursuites pénales et à désigner un juge d’instruction pour mener une enquête.
Ainsi, elle représente un moyen d’action en cas de classement sans suite de la plainte simple initialement déposée.
En outre, cette procédure doit être privilégiée lorsque l’auteur de l’infraction est inconnu, ou lorsque le préjudice n’est pas établi, ou encore lorsque l’infraction est complexe à démontrer.
Le doyen fixera le montant de la consignation, puis après versement de celle-ci par le plaignant désignera un juge chargé de l’instruction, et communiquera le dossier au procureur de la république.
Le montant de la consignation (environ de 500 à 1500 euros) est établi en fonction des revenus.
En cas de victime bénéficiaire de l’aide juridictionnelle, il n’y a pas d’obligation de consignation.
La consignation sera remboursée à la fin de la procédure si la constitution de partie civile n’est ni abusive ni dilatoire.
Il est conseillé de déposer plainte contre X, et non contre une personne nommément désignée, car ainsi le plaignant à l’opportunité de décrire son agression, éventuellement d’indiquer sur qui ses soupçons se portent, sans néanmoins risquer de voir sa responsabilité engagée pour dénonciation calomnieuse en cas d’ordonnance de non lieu ou de relaxe.
A l’issue de l’instruction, le juge clôture le dossier par une décision appelée ordonnance.
Il peut s’agir d’une ordonnance de non lieu lorsque les faits reprochés ne lui paraissent pas établis, ou que la culpabilité de l’auteur n’est pas prouvée.
Dans ce cas, la victime qui désire maintenir sa plainte doit faire appel devant la chambre d’instruction de la Cour d’Appel.
Lorsque l’instruction révèle des éléments probants, dans ce cas le juge rend une ordonnance de renvoi devant le Tribunal Correctionnel, pour les délits, ou la Cour d’Assises, pour les crimes.
b) les droits de la victime
La loi du 15 novembre 2001 a institué la procédure du témoignage anonyme, en faveur des témoins-victimes qui sont exposées à un risque important «susceptible de mettre en danger la vie ou l’intégrité physique de cette personne, des membres de sa famille ou de ses proches».
L’autorisation ne peut être accordée que par le Juge de la liberté et de la détention, saisi par requête du Procureur de la république ou du Juge d’instruction.
La constitution de partie civile, génératrice de nombreux droits peut se faire dès le dépôt de la plainte, ou en cours de procédure à tout moment devant le juge d’instruction, et au plus tard devant la juridiction le jour de l’audience, et ce même par fax ou courrier depuis la loi du 15 juin 2000.
Elle reconnaît à la victime le droit à l’information: c’est-à-dire d’avoir accès à l’ensemble du dossier du juge d’instruction.
Elle lui donne le droit d’être assistée ou représentée par un avocat.
Elle lui ouvre le droit d’obtenir une indemnisation.
Et surtout, elle lui accorde le droit d’avoir un rôle actif lors de l’instruction: c’est-à-dire de participer à l’instruction par ses observations, notes et demandes d’actes ( auditions, perquisition, transport sur les lieux, examen médicale ou psychologique…).
Le Juge d’instruction doit, s’il entend rejeter une demande d’acte, rendre une ordonnance motivée dans le délai d’un mois maximum, à compter de sa réception.
Cette ordonnance est susceptible d’appel devant la chambre de l’instruction.
La partie civile peut demander au juge d’instruction, un an après sa constitution, ou lorsque le juge n’a accompli aucun acte depuis quatre mois, la clôture de l’instruction si elle estime que suffisamment de preuves ont été réunies à l’encontre de l’auteur.
Le Juge peut décider de qualifier de délits, des faits qui sont en réalité criminels.
L’exemple le plus courant est requalifier des viols en agressions sexuelles, la juridiction compétence n’est alors plus la cour d’assise, mais le tribunal correctionnel.
Cette pratique ne repose sur aucun texte, mais elle est utilisée, bien qu’illégale pour des raisons d’opportunité.
Ainsi, il est souvent avancé comme arguments, aux victimes, que les audiences de cour d’assises sont beaucoup plus éprouvantes, que les délais d’audiencement sont plus courts devant le Tribunal Correctionnel, et enfin qu’il y a un risque plus grand que les jurés, se prononçant sur leur intime conviction, prononcent un acquittement, quand bien même les faits seraient établis.
II. LE PROCÈS PÉNAL
A l’issue du parcours judiciaire, le procès permet d’établir la responsabilité de l’auteur des faits, de prononcer une sanction à son encontre et d’établir le montant de l’indemnisation de la victime.
La partie civile a toujours la possibilité de demander à ce que l’audience se déroule à huis clos.
Cette demande est de droit devant la Cour d’Assises, s’il s’agit de viol ou d’agression sexuelle.
La victime n’a aucune obligation de se présenter à l’audience, néanmoins cela est fortement recommandé.
Le Tribunal ou la Cour peut ordonner la comparution personnelle de la victime à l’audience, et renvoyer l’affaire à cette fin, si les faits sont contestés.
La Cour a même le pouvoir de la contraindre à venir.
La victime peut avoir dans certains cas à faire le choix entre la voie pénale et la voie civile.
Les avantages du recours au juge pénal sont multiples :
En premier lieu, elle n’a pas à prouver les faits qui ont provoqués son préjudice (sauf citation directe), la preuve est rapportée par le ministère public.
En second lieu, le procès pénal est plus rapide et moins coûteux.
En troisième lieu, si la victime a fait le choix de la voie pénale, elle peut y renoncer jusqu’à l’audience de jugement, et préférer agir au civil, or à contrario il lui impossible de changer de voie si elle a introduit une action au civil.
a) Le Tribunal Correctionnel
Il est composé de trois magistrats professionnels.
Cependant, pour les affaires simples et visant un délit puni d’une peine d’emprisonnement inférieur à 5 ans, l’audience se tient à juge unique.
La partie civile doit apporter au Tribunal les justificatifs de sa demande.
Si elle n’a pas été en mesure de réunir l’intégralité des documents, ou si son préjudice n’est pas consolidé, il est possible de demander un renvoi sur les intérêts civils.
Ainsi lors d’une première audience, il sera statué sur la culpabilité du prévenu et la sanction, et lors d’une seconde, il sera étudié les demandes de dommages et intérêts de la victime.
En outre en cas de préjudices importants, il est nécessaire de demander au Tribunal d’ordonner une expertise, afin de disposer d’éléments suffisants pour l’audience sur les intérêts civils.
Le Tribunal peut accorder en attendant le résultat de celle-ci, une provision à la victime.
L’expertise ordonnée par le Tribunal est contradictoire, c’est-à-dire que le condamné pourra assister aux opérations d’expertise ou s’y faire représenter, contrairement à l’expertise ordonnée en cours d’instruction.
Après le dépôt du rapport, une nouvelle date d’audience est fixée au cours de laquelle le tribunal fixe le montant de l’indemnisation de la victime.
Lorsque dans une même affaire sont impliqués tant des majeurs que des mineurs, la victime a deux possibilités qui s’offrent à elle :
- soit elle se constitue partie civile devant la juridiction des majeurs et celle des mineurs, afin de réclamer devant chaque juridiction des dommages et intérêts;
- soit elle forme une demande unique devant la juridiction des majeurs (Tribunal correctionnel ou Cour d’Assises).
Dans ce cas, les représentants légaux seront convoqués et condamnés à réparer le préjudice de la victime à cette audience, bien que le mineur ne soit pas jugé par cette juridiction.
En revanche, il convient de préciser que s’il n’a pas été encore statué sur la culpabilité du mineur au moment de l’audience, la juridiction des majeurs pourra surseoir à statuer sur l’action civile, afin d’attendre que la juridiction des mineurs rende sa décision.
Il convient de préciser que la victime ne peut faire appel d’un jugement que pour la partie de décision concernant son droit à dommages et intérêts et non sur la peine pénale prononcée à l’encontre du délinquant.
Le délai d’appel est de dix jours.
b) La Cour d’Assises
L’audience en Cour d’Assises présente des spécificités:
Les trois magistrats professionnels sont entourés d’un jury composé de citoyens de plus de 23 ans, sachant lire et écrire, jouissant de leurs droits civiques, et n’étant pas atteint par une incapacité.
La liste des jurés est établie chaque année, par tirage au sort dans chaque mairie, à partir de la liste électorale.
L’audience commence par la formation du jury.
Le Président procède au tirage au sort de neuf jurés, ou de douze si la Cour d’Assises siège en appel (plus des jurés suppléant en cas de défaillances).
La partie civile n’a aucun pouvoir de récusation, mais l’accusé ou son conseil ont ce pouvoir jusqu’à cinq jurés en première instance, et six jurés en appel, et l’avocat général à hauteur de quatre en première instance et cinq en appel.
Ils ont la possibilité d’exercer leurs pouvoirs de récusation jusqu’à ce que le juré ait rejoint sa place, et sans aucune justification à l’appui de leur annonce.
Une fois, les jurés tirés au sort, le président ordonne au greffier de l’audience d’effectuer la lecture de l’ordonnance de renvoi.
Les débats sont oraux, ainsi les jurés ne peuvent consulter le dossier, et ne doivent délibérer qu’à partir de ce qu’ils ont entendu, et retenu aux cours des débats.
Ils ont néanmoins la possibilité de prendre des notes, qu’ils pourront consulter lors du délibéré.
Il est donc primordial de demander au Président de lire toutes les pièces du dossier qui sont nécessaires à l’information des jurés
En premier lieu, le Président interroge l’accusé, puis les témoins, les experts, et enfin la partie civile.
Après les plaidoiries de l’avocat de la partie civile, l’avocat général et de l’avocat de l’accusé, le Président donne la parole en dernier à l’accusé.
Lorsque les débats sont clos, le Président lit les questions auxquelles vont devoir répondre les jurés, concernant la culpabilité de l’accusé et les éventuelles circonstances aggravantes ou atténuantes.
Il est ensuite rappelé solennellement aux jurés la formule suivante affichée dans la salle de délibération :
«La loi ne demande pas compte aux juges des moyens par lesquels ils se sont convaincus, elle ne leur prescrit pas de règles desquelles ils doivent faire particulièrement dépendre la plénitude et la suffisance d’une preuve, elle leur prescrit de s’interroger eux-mêmes, dans le silence et le recueillement, et de chercher, dans la sincérité de leur conscience, quelle impression ont fait, sur leur raison, les preuves rapportés contre l’accusé, et les moyens de sa défense. La loi ne leur fait que cette seule question, qui renferme toute la mesure de leur devoir: «avez-vous une intime conviction?»
La décision des jurés est donc fondée sur leur seule intime conviction, et n’a pas à être motivée.
Pour obtenir la culpabilité de l’accusé, il faut une majorité qualifiée de huit voix sur neuf en première instance, et dix voix sur douze en appel.
La décision sur la peine se forme ensuite à la majorité absolue, de cinq voix sur neuf en première instance, et sept voix sur douze en appel.
Une fois les majorités requises, le délibéré prend fin, et l’audience reprend afin que la Cour rende son arrêt.
Puis lorsque le verdict est rendu, les jurés se retirent, et les trois magistrats de la Cour d’Assises statuent en audience civile sur les demandes en dommages et intérêts de la partie civile.